Troubles des conduites alimentaires (TCA)

Mise à jour : 04/03/2024
Troubles des conduites alimentaires (TCA)
Dans les troubles des conduites alimentaires comme l'anorexie et la boulimie, la relation à la nourriture est perturbée. Le plus souvent, le traitement de ces troubles implique à la fois médecins, psychologues et diététiciens.

L’anorexie, qu’est ce que c’est ?

L’anorexie mentale est un trouble des conduites alimentaires (TCA), c’est-à-dire une perturbation de la relation à l’alimentation. Elle se caractérise par une perte de poids intentionnelle. Les personnes les plus concernées sont les jeunes filles, à l’adolescence, mais cela peut aussi toucher les jeunes hommes. 

L’anorexie, comme les autres TCA, peut avoir des conséquences importantes sur notre vie affective, familiale, sur les études, le travail et les relations amicales. Malgré ces difficultés, il est possible de se rétablir de ce trouble.

Les symptômes de l’anorexie

Les symptômes de l’anorexie mentale sont indiqués dans la Classification internationale des maladies (CIM-10, 2008), l’une des deux classifications de référence. Ils comprennent : 

  • Perte de poids intentionnelle, associée à la peur de grossir et d’avoir un corps flasque
  • Maintien d’un poids faible, en dessous des normes pour l’âge et la taille
  • Vomissements provoqués et utilisation de laxatifs (accélérant le transit intestinal), coupe-faims et diurétiques (augmentant la production d’urine)
  • Dénutrition de gravité variable, s’accompagnant de perturbations des fonctions physiologiques, notamment un arrêt des règles pour les jeunes filles et les femmes
  • Restriction des choix alimentaires (la personne supprime certains aliments)
  • Pratique excessive d’exercices physiques.

L’anorexie peut apparaître seule, ou accompagnée d’épisodes de boulimie associés à une sensation de perte de contrôle, un profond sentiment de culpabilité et de l’angoisse. 

Pendant un moment, les symptômes de l’anorexie peuvent passer inaperçus. Puis, les conflits entre la personne et son entourage deviennent majeurs. Celle-ci est décrite comme tyrannique, imposant ses volontés à sa famille, et elle-même décrit sa famille comme ne la laissant pas tranquille, l’épiant et ne pensant qu’à la faire manger.

Les signes auxquels prêter attention

Certains signes doivent nous alerter ou alerter notre entourage, et nous encourager à chercher l’aide de professionnels. Parmi ceux-ci : 

  • La perte de poids se poursuit au-delà d’un poids considéré comme un minimum pour l’âge et la taille de la personne
  • Les préoccupations autour de la nourriture et/ou la forme du corps deviennent envahissantes, au point d’avoir des répercussions sur les relations sociales et familiales de la personne
  • Les règles s’espacent ou disparaissent chez une jeune fille pour laquelle celles-ci étaient jusque-là régulières, ou bien une hyperpilosité apparaît
  • La nourriture est l’occasion de conflits systématiques et violents avec l’entourage.

L’anorexie peut survenir subitement à la suite d’une déception scolaire ou sentimentale, d’un deuil ou d’un régime amaigrissant commencé suite à une remarque « vexante » sur le physique de la personne. Un début plus progressif est également possible.

On peut passer à côté d’une anorexie mentale, en prenant ce trouble pour :

  • Un simple caprice alimentaire
  • Un manque d’appétit, en lien avec une maladie physique ou suite à une contrariété
  • La caractéristique d’un « petit appétit »
  • Un régime minceur dont l’objectif serait raisonnable et où le poids perdu amènerait satisfaction.

Quand ce n’est pas de l’anorexie

L’anorexie peut aussi être confondue avec d’autres troubles, pourtant distincts. Parmi ceux-ci : 

  • La dépression
  • Le syndrome d’alimentation sélective, où tout changement amène une angoisse importante avec un impact sur la vie sociale
  • La phobie de déglutition (la peur d’avaler) qui peut apparaître après un événement traumatisant comme une fausse route ou une intubation
  • La phobie alimentaire, qui peut se porter sur certains aliments en fonction de leur couleur, ou être liée à la peur d’attraper des maladies
  • Le trouble obsessionnel compulsif (TOC), où la diminution de la prise d’aliments est liée à un besoin de contrôle sur tous les actes du quotidien.

La boulimie, qu’est ce que c’est ? 

La boulimie est également un trouble des conduites alimentaires. Elle correspond à une envie irrésistible de manger beaucoup et vite, un comportement qu’on appelle hyperphagie. Cette pulsion se manifeste dans des moments de crise, sans aucune sensation de faim ni sentiment de plaisir. La quantité de nourriture consommée est importante. Celle-ci peut être ingérée sans être mâchée. 

Ce trouble a des points communs avec l’anorexie, notamment la préoccupation excessive du poids et des formes du corps.

Les symptômes de la boulimie

On distingue, dans la CIM-10, deux types de boulimie, la boulimie tout court, et l’hyperphagie boulimique. 

La boulimie se manifeste par des crises de boulimie suivies de comportements visant à lutter contre la prise de poids : vomissements provoqués, utilisation de laxatifs, de diurétiques, jeûne, exercice physique intensif. Le poids de la personne est normal ou légèrement inférieur à la normale.

L’hyperphagie boulimique correspond à des crises de boulimie seules, sans comportement destiné à éviter de grossir. Elle peut occasionner un surpoids ou une obésité.

Les signes auxquels prêter attention

La crise de boulimie survient presque toujours en dehors des repas. Souvent, nous nous cachons et nous mangeons le plus vite possible car nous nous sentons coupable. Aussi il est utile que l’entourage soit attentif à tout comportement qui pourrait évoquer une boulimie, afin d’amener la personne à en parler.

S’il nous arrive de faire des crises de boulimie, nous pouvons nous interroger sur leur fréquence. Quand elles se reproduisent régulièrement, alors il peut être utile de chercher de l’aide.

La boulimie et l’hyperphagie boulimique sont souvent associées à un état dépressif, une anxiété, un sentiment de honte lié à la perte de contrôle, une faible estime de soi. 

Comment traiter les troubles des conduites alimentaires 

Des travaux scientifiques récents tendent à rapprocher les TCA des conduites addictives comme la toxicomanie ou la dépendance à l’alcool.

La ou le médecin traitant habituel, généraliste ou pédiatre, pose le diagnostic. Elle ou il prescrit les examens nécessaires et conseille sur le choix d’une consultation spécialisée ou d’un service hospitalier, de professionnels tels que psychiatre ou pédopsychiatre, psychologue, diététicien. Par la suite, ce médecin devient le référent pour assurer le suivi dans le temps, en lien avec les autres intervenants. 

Le suivi physique et psychologique

Un TCA implique un suivi de notre état général et de notre poids. Des examens peuvent être prescrits, comme des bilans sanguins, dentaires, digestifs ou cardiaques. Des compléments nutritionnels comme des vitamines ou du fer peuvent être proposés. 

Dans l’anorexie, des séances d’activité physique adaptée (APA) sont proposées par plusieurs centres hospitaliers. Il s’agit de réaliser des exercices de manière sécurisée, en tenant compte de nos particularités ou de nos limites, après consultation d’un médecin. Il n’existe pas de recommandation nationale ou internationale concernant cette pratique, mais des études scientifiques montrent des résultats encourageants.  A la date de novembre 2023, le CHU Paul-Brousse à Villejuif (Val-de-Marne), le CHU de Nantes (Loire-Atlantique) et l’hôpital Saint Vincent de Paul à Lille (Nord) proposaient l’APA dans leur programme de soins. 

Le suivi psychologique permet d’évaluer notre état psychique et de rechercher d’éventuels troubles psychiques associés au TCA. Il est fréquent, notamment au début, que la personne ne reconnaisse pas l’existence d’une anorexie et considère ne pas avoir besoin d’aide. L’installation d’une relation de confiance permet le plus souvent une prise de conscience et amène à rechercher du soutien. 

La rééducation nutritionnelle

Pour la personne concernée par l’anorexie, un programme de réalimentation progressive est mis en place. Ce programme est négocié entre la personne et l’équipe soignante, afin d’aboutir à une sorte de contrat décrivant les différentes étapes pour le retour à une vie satisfaisante. S’il s’agit d’une ou d’un adolescent, les parents peuvent y être associés.

Dans le cas de la boulimie, le contrat porte sur la conduite à tenir face à la nourriture. Il doit permettre de réapprendre à se nourrir de manière diversifiée et équilibrée, en retrouvant une régularité dans le rythme des repas. Dans les TCA, la rééducation nutritionnelle vise, plus globalement, à nous aider à retrouver le plaisir de la nourriture. 

Le recours à la psychothérapie

Le traitement inclue une psychothérapie adaptée aux TCA. Il existe différentes formes de psychothérapies dont nous pouvons bénéficier : cognitivo-comportementale, systémique, individuelle ou en groupe, analytique, etc.

La participation de la famille

La famille est soutenue et impliquée dans les soins, en particulier lorsque la personne concernée est une ou un adolescent. Des entretiens réunissant, à l’initiative d’un thérapeute, la personne et ses parents, ses frères et sœurs, sa compagne ou compagnon, aident à améliorer la relation avec l’entourage et à se rétablir.

Les soins en consultation

Le traitement des TCA est réalisé, de manière privilégiée, à travers des consultations et, si besoin, des hospitalisations la journée seulement. Le rythme plus ou moins soutenu de ces consultations dépend de notre état de santé physique et mentale. Ce mode de soins, dits ambulatoires, permet de ne pas couper la personne de sa famille, de sa scolarité, de ses études ou de son travail. 

Les soins en hospitalisation

Une hospitalisation peut se révéler nécessaire dans certains cas. Elle peut se dérouler dans un service ayant une compétence dans le traitement des troubles des comportements alimentaires, ou dans un service non spécialisé. Un accompagnement au moment du retour à la maison et du retour en cours ou au travail pourra être proposé. 

Les cas qui peuvent nécessiter une hospitalisation sont les suivants : 

  • Complications médicales, comme un trouble cardiaque, une déshydratation
  • Complications psychologiques, notamment une dépression sévère, des idées
    de mort, un risque suicidaire, un refus de soins
  • Échec du traitement en consultation ou en hôpital de jour avec, dans le cas de l’anorexie, poursuite de la perte de poids
  • En cas d’anorexie, dénutrition sévère mettant en jeu la vie de la personne.

Une hospitalisation peut également être nécessaire pour des motifs indépendants de l’état de la personne : 

  • Coordination des soins difficile, en raison de la situation géographique ou d’un contexte familial peu propice
  • Famille épuisée, débordée, ayant besoin d’être relayée. 

L’hospitalisation peut être vécue comme un moment éprouvant par la personne et son entourage, car cette décision vient confirmer la gravité de la situation. Dans le cas où une personne concernée par l’anorexie court un danger vital, ou si prendre de la nourriture lui est devenu trop difficile, l’équipe médicale utilise une sonde (un tube fin et flexible allant de la bouche ou du nez jusque dans l’estomac). Ce dispositif permet une alimentation artificielle par une solution apportant les principaux nutriments.

Malgré son inconfort, ce mode d’alimentation apporte souvent un soulagement, tant le moment des repas peut être difficile. Des explications claires sont données à la personne et à l’entourage. La coopération est toujours recherchée. Cependant, dans ces circonstances, la question de soins sans consentement peut se poser. 

S’aider par soi-même

Si le recours aux soins est souvent indispensable en cas de TCA, nous pouvons aussi développer des ressources personnelles qui peuvent nous aider à aller mieux.

Nous pouvons par exemple porter attention à nos rythmes de sommeil, à notre consommation d’alcool, de médicaments anxiolytiques ou de substances psychotropes comme le cannabis ou d’autres drogues. Nous pouvons pratiquer la relaxation ou la méditation, si ce type d’exercice nous convient. 

Des échanges avec des personnes vivant ou ayant vécu des troubles des comportements alimentaires peuvent apporter une aide. Pour cela nous pouvons contacter une association de patients et de proches, rejoindre un groupe de paroles ou une communauté de patients sur internet.

Vivre avec une personne concernée par un trouble des conduites alimentaires

L’entourage ne peut se substituer au médecin ou au psychothérapeute, mais il peut assurer un soutien essentiel dans ces moments difficiles. Ce soutien peut notamment consister à :

  • Repérer les signes de souffrance chez son proche et faire le premier pas pour en parler
  • Aider son proche à chercher de l’aide, à consulter un professionnel et, si besoin, à suivre un traitement
  • Soutenir son proche dans ses activités de la vie quotidienne si cela est nécessaire.

L’entourage peut trouver de l’aide pour lui-même, de l’écoute et des conseils auprès d’associations de patients et de proches.

Cet article a été écrit par Estelle Saget (Psycom) à partir de la brochure Troubles des conduites alimentaires rédigée par Patrick Eche (pédopsychiatre), Céline Loubières (Psycom) et Jean-Baptiste Hazo (CCOMS).

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Patrick Eche, pédopsychiatre des hôpitaux, est décédé en 2017.

Jean-Baptiste Hazo, ingénieur de recherche au CCOMS jusqu’en 2020, n’a pas reçu entre 2019 et 2022 de financement d’entreprises fabriquant ou commercialisant des produits de santé (médicaments, dispositifs médicaux, matériel médical, e-santé, marketing médical, etc.).

Céline Loubières déclare ne pas avoir de liens d’intérêts avec des entreprises fabriquant ou commercialisant des produits de santé (médicaments, dispositifs médicaux, matériel médical, e-santé, marketing médical, etc.).

Estelle Saget déclare ne pas avoir de liens d’intérêts avec des entreprises fabriquant ou commercialisant des produits de santé (médicaments, dispositifs médicaux, matériel médical, e-santé, marketing médical, etc.).

Ces déclarations peuvent être vérifiées sur la Base Transparence Santé du Ministère de la Santé.